Page:Lacordaire - Œuvres du R.P. Henri-Dominique Lacordaire, tome 1 - Vie de Saint-Dominique.djvu/29

Cette page n’a pas encore été corrigée

— XXIV —

champ nommer le conférencier chanoine honoraire de sa métropole.

Mais si c’était un grand résultat d’avoir créé cet auditoire nouveau, et d’y avoir provoqué l’enthousiasme d’un jour, le plus difficile restait à faire. Comment, en effet, assujettir longtemps à un cours de doctrine ces hommes entraînés par le mouvement fiévreux des affaires politiques? et comment les enchaîner à une parole sacerdotale qui ne rendait si bien les accents et les émotions du siècle, que pour faire enfin songer à l’éternité ? Pour retenir ces flots d’auditeurs toujours mobiles, impatients, et naturellement portés à la révolte, le jeune conférencier pensa qu’il devait renoncer au plan d’apologétique ordinairement adopté, qui commence par la base de l’édifice religieux pour s’élever de degré en degré jusqu’au sommet, passant du Dieu invisible à la Révélation, à Jésus-Christ, à l’Église. Il fallait, afin de saisir à la hâte ce siècle au cœur de ses préoccupations et de ses luttes de chaque jour, s’emparer de sa passion pour les idées de société, de liberté, de réforme, de dignité humaine. Il fallait lui montrer que l’Église aussi est une société, qu’elle aussi s’occupe, au profit de l’homme, de réformes, de bonheur, de dignité, de liberté; que Jésus-Christ aussi est législateur, que l’Évangile contient toute une charte