Page:Laclos - De l’éducation des femmes, éd. Champion, 1903.djvu/99

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

effet par un cosmétique doux[1] effacez ensuite, par un parfum léger, l’odeur fade ou aromatique qu’ils laissent après eux ; usez mais n’abusez pas, on soupçonne volontiers la femme qui se parfume trop d’y être portée par quelque raison secrette ; sans cela, même une odeur trop forte, telle agréable qu’elle fût, détruiroit l’ivresse en détournant l’attention ; car ce n’est pas de la rose ou de l’œillet, c’est de vous que vous voulez que votre amant s’occupe ; qu’il puisse donc croire que vous-même exhalez le parfum qu’il respire ; dans ces soins solitaires, n’imitez pas surtout ces femmes plus vaines que sensibles, qui, satisfaites d’un triomphe passager, ne songent qu’au public, et oublient leur amant ; femmes injustes, vous vous plaignez d’être bientôt abandonnées par eux, vous les accusez de légèreté ; prenez-vous-en à vous-mêmes de cette apparente perfidie ; votre figure rieuse et fraîche leur avoit fait illusion, votre corps flétri les a détrompés. La figure attire, mais c’est le corps qui retient. L’âme est le filet et l’autre la cage ; mais l’oiseleur prudent avant de tendre ses pièges, s’occupe des moyens de conserver la proïe qu’il pourra faire ; imitez-le dans ses précautions, puis vous songerez à embelir votre figure ; ce soin demande encore quelques

  1. Il en est un simple et salubre dont l’usage nous paroit trop peu fréquent, et que nous énonçons volontiers icy : prenez de la graine de pavot blanc, pilez-la dans un mortier, en y jetant de l’eau en sorte que l’espèce de laict qui en provient soit plus épais que clair ; passez le tout, et servez-vous en au moins toutte la semaine.
    Note de Ch. de L.