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ROXANE

apprécions grandement, Roxane !

— J’en suis bien contente, alors, répondit Roxane.

Armand se mit à rire soudain, ce qui fit que tous le regardèrent, fort étonnés.

— Vous ne savez pas, Roxane, dit-il, combien Lucie vous trouvait à plaindre, vous et Hugues, parce que vous n’aviez pas de famille ! Comme si…

— Et Lucie avait raison de nous plaindre, répondit gravement la nouvelle maman. Comment nous avons pu vivre sans notre bébé chéri jusqu’à présent, c’est un mystère pour moi.

Armand ne répondit rien. Il avait renoncé, depuis longtemps, de faire entendre raison à une mère surtout ; mais lui et Hugues se regardèrent en souriant.

On donna un grand festin de baptême. À ce festin assistaient, (à part le papa, la maman, le parrain, la marraine), le Docteur et Mme Philibert, le père Noé et Mlle Catherine (cette dernière ayant eu l’insigne honneur de porter l’enfant à l’église). Nestor, le policier et sa femme étaient aussi présents. Ne pas oublier Rita, qui portait si dignement son titre de tante, puis Léa, qu’on nommait aussi « tante Léa », pour lui faire plaisir. Belzimir, Souple-Échine et Célestin servaient les mets du festin et ces trois fidèles serviteurs se réjouissaient du bonheur de leurs maîtres.

On était au dessert, quand un domestique remit à Roxane une petite boîte bien ficelée, et quand elle eut enlevé les ficelles, on aperçut une paire de mignons mocassins finement perlés. La boîte contenait aussi un feuillet d’écorce de bouleau, sur lequel Roxane lut cet envoi :

« À l’enfant de Roxane, ma chère sœur au visage pâle Cœur-Transpercé envoie ces mocassins. Et puisse la nouvelle-née, toute sa vie, ne fouler de ses pieds mignons que des prairies parsemées de boutons-d’or, de marguerites, et aussi de roses sans épines ! »

— Oh ! N’est-ce pas gentil ! s’écria Roxane. Ce pauvre Cœur-Transpercé !

— L’avez-vous jamais revu ce Sauvage, M. de Vilnoble ? demanda le père Noé.

— Oui, père Noé, répondit Hugues. Il est venu nous rendre visite, l’année dernière, et nous l’avons gardé huit jours ici. Cœur-Transpercé a gardé un véritable culte pour Roxane, « sa sœur au visage pâle » comme il dit toujours. Nous lui avons offert d’aller demeurer sur l’Île Rita ; mais il préfère la liberté des grandes prairies.

Quand on fut installé dans le salon, après le festin, Nestor demanda :

— Je suis arrivé un peu en retard pour le baptême, Mme de Vilnoble, et j’aimerais bien savoir quel nom vous avez donné à votre mignonne ?

— Nous lui avons donné le plus beau nom qui soit, répondit Hugues. Le nom d’un ange sur terre, d’un ange de douceur et de bonté ; nous l’avons nommée ROXANE.


FIN