négresse, qui avait une hâte excessive de se débarrasser de son compagnon.
— Adieu, Salomé !… Si jamais vous avez l’occasion de revoir les Hynes, s’il vous plaît me rappeler à leur souvenir, dit Jacobin d’un ton moqueur qui ne manqua pas d’inquiéter quelque peu la négresse.
Tout en se dirigeant vers la maison, Salomé se demandait :
— Aurait-il des soupçons ?… Il faut que j’avertisse Mlle Luella et son père, au plus vite… Et puis, demain matin, je serai à la gare pour le départ du train de huit heures, afin de m’assurer qu’il part ce bon M. Jacobin !
Occupée de ces pensées, elle ne s’aperçut pas qu’elle était suivie, de loin, par celui dont elle se sauvait. Oui, Jacobin avait des soupçons… il se défiait de la négresse… Le meilleur moyen de se renseigner, d’ailleurs, n’était-ce pas de la suivre pour voir où elle allait ?
Bien lui en prit à ce bon Jacobin, car, à quelques pas d’une maison, dont il venait de sortir, il vit Richard d’Azur.
— M. Hynes… murmura-t-il. Il me semblait aussi !…
Mais Richard d’Azur venait de s’arrêter ; c’est que Salomé, en l’apercevant venait de s’écrier :
— Miséricorde ! M. d’Azur !
— Eh ! bien ? Qu’y a-t-il, Salomé ? demanda le père de Luella.
— Il y a… Il y a… Jacobin… Je viens de le rencontrer.
— Hein ? Quoi ? Jacobin ! Il n’est donc pas parti avec le cirque ?
— Évidemment non, puisque je viens de le rencontrer et qu’il m’a parlé ! Mais vite ! Retournez à la maison ! S’il allait vous voir !… Je l’ai dépisté, je crois ; cependant, je n’en suis pas bien sûre.
— Jacobin… murmura Richard d’Azur, comme s’il eut eu peine à comprendre. Il… Il…
— Ah ! Rentrez dans la maison, hein ! cria la négresse. D’ailleurs, j’ai mille choses à vous raconter… ainsi qu’à Mlle Luella.
Richard d’Azur pirouetta sur son talon et, courant presque, il réintégra son domicile. Salomé le suivant de près.
— Tiens ! Tiens ! se dit Jacobin qui, caché à l’ombre d’un portique, non loin, avait été témoin de ce qui venait de se passer. M. Hynes qui, probablement mascarade ici sous le nom de d’Azur !… Et Alba — … Peut-être que, de son côté, elle a choisi un autre prénom… Mais, oui !… Salomé a prononcé tout à l’heure le nom de la fille de « M. d’Azur »… Qu’était-ce donc ?… Ah Je me souviens : Luella… Dans tous les cas, je vais aller aux renseignements, sans perdre un instant !
Ce-disant, il quitta son poste d’observation et se dirigea vers une sorte de ruelle, où il avait loué une chambre pour le temps de son séjour à W…
Le lendemain matin, Salomé était à la gare… bien avant huit heures, heure fixée pour le départ du train, on le sait. Si Jacobin partait, ce serait signe qu’il n’avait eu aucun soupçon, la veille.
Il n’y avait jamais une bien grande quantité de voyageurs, à W… Quelques personnes étaient à la gare cependant, soit par affaire, soit pour attendre ou reconduire quelqu’un, soit par désœuvrement.
Le temps passait et toujours Salomé attendait… Le train était entré en gare et déjà il allait repartir. Le conducteur criait à tue tête : « All aboard ! All aboard » !… Mais, pas plus de Jacobin que sur la main !
Tout à coup, la négresse l’aperçut ; il courait à toutes jambes. Il portait à la main une petite valise. Allait-il manquer le train ?… Non ! Saisissant la rampe de l’un des derniers wagons, il sauta sur le marche-pied, puis il disparut.
— Le voilà parti ! se dit Salomé, avec un soupir de soulagement. Quel bon débarras !
Elle regarda défiler le train, puis, certaine du départ du malencontreux Jacobin, bien vite elle retourna chez elle annoncer à ses maitres la bonne nouvelle.
Le lendemain, à trois heures de l’après-midi, Richard d’Azur se disposait à sortir. Au moment où il posait la main sur la poignée de la porte d’entrée pour l’ouvrir, quelqu’un sonna à cette porte. Mme Francœur étant sortie le père de Luella ouvrit la porte.
Aussitôt, celui qui avait sonné