qu’il arriva chez les Francœur, et voici le résultat de l’examen qu’il fit de ses deux malades : M. Ducastel n’avait reçu aucune blessure grave ; il était plutôt meurtri, moulu, d’avoir été tramé sur le sol de la houillère. Il avait repris connaissance presque tout de suite ; donc, pas trop d’inquiétude à avoir à son sujet.
Mlle d’Azur… Ah ! son état n’était pas aussi rassurant. Elle était menacée d’une inflammation du cerveau. La blessure qu’elle s’était faite à la tête ayant été négligée, avait une apparence assez grave.
Déjà, elle faisait beaucoup de température, accompagnée de crises de délire, au milieu desquelles elle vivait la scène (ou plutôt le rôle) que Patrice Broussailles lui avait enseigné.
Ceux qui l’entendirent balbutier des phrases sans suite, résultat des dernières impressions qu’elle avait reçues, avant de tomber malade, la plaignirent et la louangèrent en même temps.
— Oh !… Voici le… le pic ! bégayait-elle. Je me frayerai un… passage jusqu’à lui… Je le sauverai… M. Ducastel… Ce câble… Je l’attacherai sous ses bras… Si je sors de cette houillère… ce sera avec… avec lui… ou pas du tout…
— Qui eut cru que Mlle d’Azur, cette frêle jeune fille, put être héroïque à ce point ! dit, assez étonné, M. Foulon.
— La noble enfant ! s’écria Lionel Jacques.
— Moi, je l’avoue, à ma honte, je n’aimais pas beaucoup Mlle d’Azur, dit Mme Francœur… Mais depuis ce qu’elle a fait… Pensez-y M. Jacques ! Elle a risqué sa vie pour sauver celle de M. l’Inspecteur !… C’est sublime !
Et tous ceux qui entouraient Mme Francœur de répéter :
Oui. c’est sublime !
On le voit, ces deux trompeurs Luella et Patrice Broussailles, son complice, avaient parfaitement réussi à les tromper tous !
Chapitre IV
CE QUE LUI DICTAIT SON DEVOIR
Trois semaines s’étaient écoulées depuis le « désastre », comme le disaient les gens de W…, lorsqu’ils faisaient allusion à l’accident arrivé dans la houillère.
Yvon Ducastel était retourné à son bureau au bout de huit jours. Il se sentait encore quelque peu moulu il est vrai ; mais il aimait trop ses occupations pour s’en tenir éloigné sans raisons graves.
Luella d’Azur était devenue une intéressante convalescente. Elle avait été bien près de la mort et son père avait failli mourir lui-même d’inquiétude, à propos de sa fille.
Salomé avait fait véritablement pitié pendant ces trois dernières semaines. Sans cesse, ses yeux roulaient dans leurs orbites et souvent on eut pu l’entendre sangloter, en quittant la chambre de sa chère petite maîtresse.
Richard d’Azur pouvait se promener dans la maison maintenant, à l’aide d’une canne, ou du bras solide de la négresse.
Tout allait donc pour le mieux.
Cependant, en revenant de son bureau, ce jour dont nous parlons, Yvon avait l’air tout chose. Il était très pâle. De temps à autre, ses sourcils se fronçaient légèrement et un pli se creusait sur son front. La raison ?… La voici :
Ce soir-là, Luella allait veiller dans le salon, pour la première fois, depuis qu’elle était tombée malade. Or, Richard d’Azur avait fait entendre au jeune homme que sa fille s’attendait à le voir… qu’elle avait exprimé le désir qu’il veillât avec elle et son père… Yvon savait ce que cela voulait dire… il ne le savait que trop ! Son devoir lui dictait la conduite qu’il devait tenir vis-à-vis Mlle d’Azur… Cette jeune fille, qui avait risqué sa vie pour lui… Sans être le moindrement prétentieux, notre héros n’était pas aveugle non plus et il ne pouvait entretenir de doute sur les sentiments qu’il avait inspirés à la jeune fille du millionnaire…
D’ailleurs, Richard d’Azur, sans trop en avoir l’air lui avait rappelé, chaque jour, le dévouement de sa fille… Elle avait préféré risquer sa propre vie, plutôt que de s’enfuir de la houillère sans lui… etc., etc.
Yvon donc, savait qu’il avait