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famille par une des premières fournées qui eut lieu. Quand on reconnut l’innocence de l’expulsé, on ne voulut jamais, malgré les démarches persistantes de son père, le réintégrer au lycée qu’en qualité d’externe.

Cette injustice fut commise à l’instigation d’un maître d’études, affligé d’un vice infâme, que Lacenaire avait surpris en flagrant délit d’attentat aux mœurs.

Devenu externe, l’élève se livra avec passion à la pratique de l’école buissonnière, et forma, avec une douzaine de gaillards de son âge, un cercle ambulant dont les séances se tenaient dans les petits cafés borgnes de la ville ou dans les auberges situées le long des saulées de la Saône. Ce genre de vie coûtait cher à mener, et le jeune Lacenaire, qui soupçonnait à peine à Saint-Chamond et à Alix de quelle utilité pouvait être l’argent, ressentit tout d’un coup un grand besoin d’en avoir. Ce n’était pas chose facile ! Il songea tout d’abord, pour se tirer d’affaire, à la première opération qui vient en tête au collégien ayant des passions à satisfaire, et résolut de tirer parti de ses livres classiques. Il commença timidement par négocier son Jardin des racines grecques ; mais en ayant tiré peu de fruit, comme dirait un vaudevilliste, il livra à la circulation une collection de dictionnaires grecs et latins, et plusieurs autres livres.

Son escarcelle se remplit au moyen de ces spéculations de librairie fréquemment renouvelées ; mais toute chose a une fin, surtout la bibliothèque d’un lycéen, et l’élève se trouva encore au dépourvu. Ce fut alors qu’il forma avec son frère aîné une association dont le but