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à voler qu’après avoir été repoussé par la rédaction de ce journal, et il fit particulièrement contre M. Altaroche une chanson satirique, qui n’est pas fameuse. il la faisait circuler à la Cour d’assises le jour même où s’ouvrirent les débats de son affaire ; car Lacenaire, fidèle à sa monomanie, à sa toquade, comme on dirait maintenant, n’avait souci que de sa réputation littéraire.

Après avoir renoncé à ses rêves de journalisme, le voleur revint à ses anciens projets criminels, et conçut l’idée d’assassiner les garçons de caisse des riches maisons de banque de Paris, afin de s’en approprier les recettes. Ce plan échoua assez souvent, et d’une façon assez éclatante, rue Montorgueil, comme on le verra dans la suite. Mais, avant d’arriver à ces entreprises, qu’on nous permette de parler enfin d’Avril, ouvrier menuisier, le principal complice sur lequel comptait Lacenaire.

Il l’avait déjà connu en 1829, à Poissy, mais ce détenu était trop jeune alors pour qu’on pût former avec lui la moindre liaison. Après sa seconde condamnation, qui eut lieu en 1833, Lacenaire se retrouva à la Force dans le même atelier et côte à côte avec Avril, devenu un peu plus mûr alors. Ils firent plus ample connaissance. Une confidence en amena une autre, et le jeune homme raconta sa vie à l’assassin. Ce dernier vit d’un coup d’œil le parti qu’il y avait à tirer d’une pareille nature. On eût dit en effet qu’Avril avait été taillé pour le crime. Affligé d’appétits matériels impérieux, d’un tempérament sanguin et exubérant, d’un penchant insurmontable pour le vin, et d’une répulsion profonde pour tout ce qui exi-