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Trois mois, l’âme impassible aux assauts de la houle,
Il conseille, il grandit, il mène à Dieu la foule…
Quand l’orage est vaincu, de son règne il descend,
Le cœur pur de remords, les mains pures de sang !


X

D’autres temps sont venus. Un bandit taciturne
A mis le sceau dans l’ombre à sa gloire nocturne.
La liberté frappée, un parlement détruit,
Et le pouvoir volé, sont l’œuvre d’une nuit.
Et pour mieux assurer ce vol à main armée,
D’or, de vin et de sang il a soûlé l’armée…
Au jour de ton triomphe, ô mère ! ô liberté !
De la nuit du néant tu l’as ressuscité ;
Et parricide ingrat, ce fourbe éclos d’un crime,
Nouveau Macbeth, au lit égorge sa victime,
Et dit — du meurtre encor les bras tout ruisselants —
Qu’elle est morte frappée au cœur par ses enfants !
Et la foule — ô stupeur ! ô tourbe misérable ! —
L’applaudit et l’absout de ce meurtre exécrable,
Et dans l’infâme auteur d’un infâme attentat,
Inepte, elle sait voir le sauveur de l’État…
Et quand chacun sous lui se tait courbant la tête,
Qui se redresse encore et le juge ? Un poète !
Tant qu’à la République un seul souffle est resté,