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De vos stérilités sur tous vous vous vengez.
Parbleu ! prenez-vous en au ciel qui vous fit naître
Pour convoiter la Muse et non pour la connaître.
À produire impuissants, qu’avez-vous secondé ?
Quel noble esprit par vous fut dans sa marche aidé ?
Vit-on jamais sortir l’utile ou la pratique —
Je ne dis pas le beau — d’un crâne de critique ?
Et le barde est par vous de bon à rien traité,
De fol, de songe-creux et d’inutilité.
Et sur ce, votre voix juge, approuve ou gourmande ;
Et vous niez la sève en dévorant l’amande ;
Et régentant la lyre, et tranchant des hautains,
Dogmatisant au nom des Grecs et des Latins,
Et parlant prose et vers sans en savoir la langue,
Et pour le diamant prenant toujours sa gangue,
Et promenant sans fin vos myopes flambeaux
Du soleil des vivants, à la nuit des tombeaux,
Ricanant à la mort, insultant à la vie,
Et sans cesse ajoutant le cynisme à l’envie,
Il ne vous suffit point, acharnés disséqueurs,
De mordre, — vous raillez en déchirant les cœurs !

Quoi ! la Muse, pour vous quittant ses chastes voiles,
Vous aurait enseigné le verbe des étoiles ;
Dans la sphère de l’âme et des divinités
Vos yeux auraient accès !… Messieurs, vous vous vantez !
Et que sauriez-vous voir à ces sacrés mystères ?
Pas si haut ! Dieu vous fit pour d’autres ministères,
Ailleurs est votre place ! Exercez vos vertus