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XVII

UN SOUVENIR D’AVRIL


 

Avril emplissait l’air de souffles caressants,
Aux rameaux noirs tremblaient les bourgeons rougissants,
Dans les hauts marronniers quelques feuilles frileuses
Sortaient timidement de leurs gaines soyeuses.
Comme une jeune mère aux charmantes pudeurs,
La terre se voilait de fécondes verdeurs.
Les germes s’éveillaient sous la brise plus chaude,
La cime des forêts se teignait d’émeraude ;
De gazouillements clairs, de mille bruits joyeux
L’onde et l’oiseau fêtaient le pâle azur des cieux.
Le merle, par instants, enivré de lumière,
Des éclats de sa voix emplissait la clairière,
Et tout semblait heureux de vivre, et, seul, mon cœur
Ne pouvait secouer sa nuit ni sa langueur.
Oh ! pourquoi la tristesse et les langueurs moroses
Quand la vie en chantant s’éveille au sein des choses ?
Je ne sais ; mais ton souffle, ô le plus cher des mois,