Page:Lacaussade - Poésies, t1, 1896.djvu/35

Cette page n’a pas encore été corrigée

VIII

SOLITUDE ET RENONCEMENT


Il n’est d’autre remède à l’amour que les Piérides.
THÉOCRITE


 
Sous ton modeste toit, que l’amitié visite,
Clos tes jours occupés, cultive en paix ton art.
Ne va point dans la foule où l’homme vain s’agite :
La foule t’est mauvaise, ami ; vis à l’écart.

Dieu t’a fait le cœur haut, l’esprit inexorable ;
Tu ne saurais longtemps toi-même t’abuser.
Pour qui le voit de près, ce monde est misérable :
Il le faudrait bientôt haïr ou mépriser.

Non ! ni mépris ni haine, ami ; reste impassible.
Que la Muse à jamais soit tes seules amours.
Toi, tu te souviendrais ! dans ton âme inflexible,
Le mal comme le bien reçu vivra toujours !

Ton cœur n’est point pareil à ces plages de sable,
Oublieuses du flot quand le flot a passé.
Des jours tu garderas la trace ineffaçable,
Qu’ils aient brisé ton rêve ou qu’ils l’aient caressé.