Page:Lacaussade - Poésies, t1, 1896.djvu/217

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Étouffe en toi toute amertume,
Sois doux à tes propres douleurs :
L’oiseau lave au ruisseau sa plume,
Lavons notre orgueil dans nos pleurs.

Comme un palmier de nos collines,
Comme le saule ami des eaux,
Aime la brise où tu t’inclines
Et qui fait gémir tes rameaux.

Aime l’épine pour la rose
Qui t’enivre de son odeur ;
Refais ta vie et la compose
D’apaisement et de candeur.

L’abeille change en ambroisie
De l’absinthe les sucs amers ;
Change comme elle en poésie
L’âcre saveur de tes revers.

Songeant qu’ici-bas toute épreuve
Doit être une expiation,
Dans la coupe où ta soif s’abreuve
Bois ta propre rédemption.

Tourne-toi vers la solitude,
Et, sous la paix des palmiers verts,
Fais de toi-même ton étude,
De toi-même et de l’univers.