La terre pacifique, aux rêveuses mollesses,
Après l’âpre labeur des étés florissants,
Semblait goûter, pareille aux sereines vieillesses,
Les tièdes voluptés des soleils finissants.
Avant les froids prochains, antique Nourricière,
Repose-toi, souris à tes champs moissonnés !
Heureux qui, l’âme en paix au bout de sa carrière,
Peut comme toi sourire à ses jours terminés !
Mais nous, rimeurs chétifs, aux pauvretés superbes,
De nos vertes saisons, hélas ! qu’avons-nous fait ?
Qui peut dire entre nous, pesant ses lourdes gerbes :
« Mourons ! mon œuvre est mûre et mon cœur satisfait ! »
Jouets du rythme, esprits sans boussole et sans force,
Dans ses néants la forme égara nos ferveurs ;
Du vrai, du grand, du beau nous n’aimions que l’écorce ;
Nous avons tout du fruit, tout, hormis les saveurs !
En nombres d’or rimant l’amour et ses délires,
Nous n’avons rien senti, nous avons tout chanté.
Vides sont les accords qu’ont exhalé nos lyres !
Vide est le fruit d’orgueil que notre arbre a porté !
Tombez, tombez, tombez, feuilles silencieuses,
Fleurs séniles, rameaux aux espoirs avortés !
Fermez-vous sans écho, lèvres mélodieuses !
Endormons-nous muets dans nos stérilités !
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