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tour. Je regardai mon père s’éloigner. Je croyais à chaque instant qu’il allait s’arrêter et revenir, mais mon espérance fut trompée.

J’ai dû me remettre à faire ma clôture. Mon père revint me voir, apportant avec lui une masse de bois d’orme. Il ébranle un piquet. « Mais, mon garçon, pour qu’une clôture retienne les bêtes féroces, il faut que les piquets soient bien enfoncés dans la terre. Voici une masse et un petit banc pour te permettre de faire ton ouvrage. » Puis il s’éloigna.

Je montai sur mon petit banc. Le maillet, très pesant, était fixé à un long manche. J’essayai de le soulever jusqu’à la hauteur de ma tête. Il refusa d’aller plus haut et retomba à mes pieds. J’essayai de nouveau. Cette fois, le maillet monte au-dessus de ma tête, un des pieds du banc cède et je vais tomber avec ma massue dans le fossé boueux que j’avais reçu ordre d’approfondir. Je me jetai sur la levée du fossé et me mis à pleurer à chaudes larmes.

Tout à coup un cri perçant pénètre à mes oreilles. « À l’ouvrage, mon garçon ; ce n’est pas encore l’heure du midi. »

Ô douleur ! j’aperçois mon père courant vers moi avec la fameuse branche de merisier en main. Je relevai mon buste dans la posture la plus humble. À genoux je lui dis que je n’étais pas fait pour être habi-