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— Je veux faire un habitant comme vous, papa.

— Très bien, mon fils. Oh ! que je suis content ! Mais sais-tu que pour faire un habitant, il faut travailler bien fort ?

— Je puis travailler comme deux hommes, moi ; vous allez être surpris.

— C’est bien, mon enfant. Va te coucher pour bien travailler, demain. Bonne nuit, mon enfant.

Je me levai lestement et jetai un regard victorieux sur la hart de merisier. En passant devant ma sœur je lui fis un pied de nez, en lui disant : « Bonne nuit, mouman. »

Le lendemain matin, il faisait encore bien noir quand mon père m’appela. « À l’ouvrage, vite. » — « Mais il fait noir, papa. » — « Je ne te demande pas s’il fait noir ou clair, je te dis de te lever. » Puis d’un coup de bras, il me jette au bas de mon lit. « Après ta prière, tu iras travailler sur la terre de Claude. Il y a 25 arpents de clôture à faire, et 25 arpents de fossé à recreuser. »

« Combien d’arpents, papa ? » — « Vingt-cinq. Es-tu sourd ? »

Je fis ma prière avec un peu de distraction. Papa, ayant fini la sienne, me cria : « Je ne veux pas de traînards dans ma maison. Tu le sais. Tu ne vas plus à l’école, mon garçon. Tes journées vont commencer maintenant avant neuf heures. Vite, à l’ouvrage. »

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