Page:Lacasse - Trois contes sauvages, 1882.djvu/25

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 26 —

toujours sans m’en rendre compte, je descendais le versant d’une côte. Je ne voyais aucune piste, aucun son ne répondait à mes cris de détresse. Je songeai alors à retourner de toute vitesse vers mes enfants. Hélas ! père, Dieu exigeait encore un sacrifice. La course rapide que j’avais faite venait de m’enlever le peu de forces qui me restait. Je voulus gravir la montagne, je roulai sur la neige dans le fond d’un ravin.

Mes enfants ! père, mes enfants ! Mets-toi à ma place ; mais non, tu ne le peux, tu n’es pas mère, toi. Deux enfants étaient mourants au sommet d’une montagne au bas de laquelle je me voyais demi morte. Au pied de cette haute colline je vis que j’étais sur la glace de la rivière Manicouagan à plus de trente lieues de la première habitation.