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histoire naturelle

volume d’eau pour qu’un canot puisse en être bientôt rempli. Elle lance ce fluide avec tant de rapidité, particulièrement quand elle est animée par des affections vives, tourmentée par des blessures et irritée par la douleur, que le bruit de l’eau qui s’élève et retombe en colonnes ou se disperse en gouttes, effraie presque tous ceux qui l’entendent pour la première fois, et peut retentir fort loin, si la mer est très-calme. On a comparé ce bruit, ainsi que celui que produit l’aspiration de la baleine, au bruissement sourd et terrible d’un orage éloigné. On a écrit qu’on le distinguoit d’aussi loin que le coup d’un gros canon. On a prétendu d’ailleurs que cette aspiration de l’air atmosphérique et ce double jet d’eau communiquoient à la surface de la mer un mouvement que l’on appercevoit à une distance de plus de deux mille mètres : et comment ces effets seroient-ils surprenans, s’il est vrai, comme on l’a assuré, que la baleine franche fait monter l’eau qui jaillit de ses évents jusqu’à plus de treize mètres de hauteur ?

Il paroît que cette baleine a reçu un organe particulier pour lancer ainsi l’eau au dessus de sa tête. On sait du moins que d’autres cétacées présentent cet organe, dont on peut voir la description dans les Leçons d’anatomie comparée de notre savant collègue le citoyen Cuvier (tome II, page 672) ; et il existe vraisemblablement dans tous les cétacées, avec quelques modifications relatives à leur genre et à leur espèce.