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des dauphins.

La femelle ne donne le jour qu’à un ou deux petits ; elle les allaite avec soin, les porte sous ses bras pendant qu’ils sont encore languissans ou foibles, les exerce à nager, joue avec eux, les défend avec courage, ne s’en sépare pas même lorsqu’ils n’ont plus besoin de son secours, se plaît à leur côté, les accompagne par affection, et les suit avec constance, quoique déjà leur développement soit très-avancé.

Leur croissance est prompte : à dix ans, ils ont souvent atteint à toute leur longueur. Il ne faut pas croire cependant que trente ans soient le terme de leur vie, comme plusieurs auteurs l’ont répété d’après Aristote. Si l’on rappelle ce que nous avons dit de la longueur de la vie de la baleine franche, on pensera facilement avec d’autres auteurs que le dauphin doit vivre très-long-temps, et vraisemblablement plus d’un siècle.

Mais ce n’est pas seulement la mère et les dauphins auxquels elle a donné le jour, qui paroissent réunis par les liens d’une affection mutuelle et durable : le mâle passe, dit-on, la plus grande partie de sa vie auprès de sa femelle ; il en est le gardien constant et le défenseur fidèle. On a même toujours pensé que tous les dauphins en général étoient retenus par un sentiment assez vif auprès de leurs compagnons. On raconte, dit Aristote, qu’un dauphin ayant été pris sur un rivage de la Carie, un grand nombre de cétacées de la même espèce s’approchèrent du port, et ne regagnèrent la pleine mer que lorsqu’on eut délivré le captif qu’on leur avoit ravi.