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histoire naturelle

évolutions très-variées, nage sur un côté, se couche sur son dos, se retourne, frappe l’eau avec force, bondit, s’élance au-dessus de la surface de la mer, pirouette, retombe, et disparoît comme l’éclair.

Elle aime beaucoup son petit, qui ne l’abandonne que lorsqu’elle a donné le jour à un nouveau cétacée. On l’a vue s’exposer à échouer sur des bas-fonds, pour l’empêcher de se heurter contre les roches. Naturellement douce et presque familière, elle devient néanmoins furieuse si elle craint pour lui : elle se jette contre la chaloupe qui le poursuit, la renverse, et emporte sous un de ses bras la jeune jubarte qui lui est si chère.

La plus petite blessure suffit quelquefois pour la faire périr, parce que ses plaies deviennent facilement gangréneuses ; mais alors la jubarte va très-fréquemment expirer bien loin de l’endroit où elle a reçu le coup mortel. Pour lui donner une mort plus prompte, on cherche à la frapper avec une lance derrière la nageoire pectorale : on a observé que si l’arme pénètre assez avant pour percer le canal intestinal, le cétacée s’enfonce très-promptement sous les eaux.

Le mâle et la femelle de cette espèce paroissent unis l’un à l’autre par une affection très-forte. Duhamel rapporte qu’on prit en 1723 deux jubartes qui voguoient ensemble, et qui vraisemblablement étoient mâle et femelle. La première qui fut blessée jeta des cris de douleur, alla droit à la chaloupe, et d’un seul coup de queue meurtrit et précipita trois hommes dans la mer.