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des baleines.

dans les fourneaux de ces contrées boréales une si grande quantité d’huile de baleine, que les navires pêcheurs ne suffisoient pas pour la rapporter, et qu’on étoit obligé d’envoyer chercher une partie considérable de cette huile par d’autres bâtimens.

Lorsqu’ensuite les baleines franches furent devenues si farouches dans les environs de Smeerenbourg et des autres endroits fréquentés par les pêcheurs, qu’on ne pouvoit plus ni les approcher, ni les surprendre, ni les tromper et les retenir par des appâts, on redoubla de patience et d’efforts. On ne cessa de les suivre dans leurs retraites successives. On put d’autant plus aisément ne pas s’écarter de leurs traces, que ces animaux paroissoient n’abandonner qu’à regret les plages où elles avoient pendant tant de temps vogué en liberté, et les bancs de sable qui leur avoient fourni l’aliment qu’elles préfèrent. Leur migration fut lente et progressive : elles ne s’éloignèrent d’abord qu’à de petites distances ; et lorsque, voulant, pour ainsi dire, le repos par-dessus tout, elles quittèrent une patrie trop fréquemment troublée, abandonnèrent pour toujours les côtes, les baies, les bancs auprès desquels elles étoient nées, et allèrent au loin se réfugier sur les bords des glaces, elles virent arriver leurs ennemis d’autant plus acharnés contre elles, que pour les atteindre ils avoient été forcés de braver les tempêtes et la mort.

En vain un brouillard, une brume, un orage, un