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qu’il emprunta la plupart des chicanes litigieuses que ses « sept sçavans » retournent et discutent[1].

Il est, au surplus, tel article sur lequel certains historiens d’hier et d’aujourd’hui pourraient recevoir de ces vieux auteurs d’utiles leçons de bon sens. C’est ainsi que ni Celse, ni Porphyre, ni Julien, ni aucun de ces implacables ennemis de la foi chrétienne, qui, non contents d’exploiter la philosophie grecque, fouillaient les traditions juives pour y recueillir de quoi nuire à cette foi, ne fournissent le moindre appui aux folles hypothèses sur la non-historicité de Jésus.

L’idée que le Christ n’ait jamais existé ; qu’il doive être considéré comme un mythe, issu, en dernière analyse, des visions, de l’imagination de Paul de Tarse, cette idée-là n’a jamais germé dans leurs cerveaux. Ils ont abordé par les biais les plus divers l’histoire de Jésus pour la rabattre sur le plus médiocre plan humain : quant à en contester la réalité, ils n’y ont point songé.

J’irai plus loin. S’ils n’ont guère entrevu ce que représentait le Christ pour les âmes ardemment chrétiennes — ce commerce intime, l’obsession de cette divine présence, l’effervescence de cette « charité » — du moins ont-ils senti l’importance capitale de sa personnalité dans le développement du christianisme. Ils ont passionnément cherché à substituer à son image quelque autre image suffisamment prestigieuse pour émouvoir et fixer la piété des foules. Leur poursuite s’est égarée à travers le Panthéon des dieux et des demi-dieux, s’attachant tantôt à Héraclès — depuis long-

  1. Texte latin dans l’édition L. Noack, Schwerin, 1857. — R. Chauviré a publié en 1914 de larges fragments d’une traduction française qui remonte au début du xviie siècle, Colloque des secrets cachez des choses sublimes entre sept sçavans qui sont de différens sentimens : voy. surtout p. 147 et s. ; Celse et Julien sont amplement utilisés.