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Une quarantaine d’années après saint Justin, Tertullien reprenait avec force la même thèse. Il écrivit vers la fin du De Praescriptione haereticorum[1] :

Le rôle du diable n’est-il pas de pervertir la vérité ? N’imite-t-il pas dans les mystères des idoles les rites des sacrements divins ? Lui aussi, il baptise ceux qui croient en lui, ses fidèles : il promet que la remise des fautes sortira de ce bain. Et si je me souviens encore de Mithra, il marque là au front ses soldats. Il célèbre aussi une oblation du pain. Il offre une image de la résurrection et, sous le glaive, il enlève une couronne. Et quoi ? (Le diable) n’impose-t-il pas à son grand-prêtre un mariage unique ? Il a, lui aussi, ses vierges ; il a, lui aussi, ses continents… Il a désiré passionnément et il a pu adapter à une foi profane et rivale les documents de l’histoire sainte et des saints du christianisme, en tirant sa pensée de leurs pensées, ses paroles de leurs paroles, ses paraboles de leurs paraboles.

Et dans l’Apologeticus[2] :

Ce sont les esprits d’erreur qui ont mis en œuvre ces falsifications de votre doctrine de salut ; ce sont eux encore qui ont lancé certaines fables pour affaiblir, par leurs analogies, la foi due à la vérité, ou plutôt pour voler cette foi par ce procédé, à leur bénéfice. Ainsi on-rit de nous quand nous prêchons un Dieu’qui nous jugera, car poètes et philosophes placent de même un tribunal aux enfers. Et si nous menaçons de la géhenne, qui est un trésor de feu mystérieux et souterrain, on éclate de rire pareillement, car il y a aussi pour les morts un fleuve, le Pyriphlégéton…

Il en va de même du paradis, auquel on oppose les Champs-Élysées.

    comparées à la naissance virginale de Jésus (1re Apol., xxii, 5-6 ; Dial. avec Tryphon, lxiv, 1-5 et lxx) ; les guérisons imputées à Asclépios et celles qu’opéra le Christ (1re Apol., ibid. ; Dial. avec Tryphon, lxix) ; la « résurrection » de Dionysos et celle de Jésus (Dial. avec Tryphon, ibid.) ; l’ascension de Dionysos (Ibid.) ; la naissance de Mithra dans une grotte (Ibid., lxx) ; l’offrande du vin et d’une coupe d’eau, avec accompagnement de certaines formules, dans les mystères de Mithra, et le rite eucharistique (Dial. avec Tryphon, lxvi, 3-4 ; cf. lxx). Autre allusion moins significative dans le Dial. lxiv, 1-5.

  1. xl.
  2. xlvii, 11-14.