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son Alexandre d’Abonotique ? Il est bizarre qu’une intelligence aussi sérieuse et aussi vive que celle de Julien se soit laissé envoûter par un charlatan comme Maxime, qui sut admirablement exploiter ses tendances dévotes et ses mystérieuses curiosités. Ce Maxime avait, si l’on en croit Eunape, beaucoup de séduction personnelle : Julien fut subjugué[1]. Il allait recueillir par cet intermédiaire la tradition de Jamblique. Jamblique était mort vers 325-326 ; Julien ne put donc le connaître, mais il le révéra à l’égal de ses plus fervents disciples. Ce philosophe devait rester pour lui le « très divin Jamblique[2] », « l’illustre hiérophante[3] », « Jamblique l’inspiré[4] », « Jamblique aimé des dieux[5] », celui, disait-il, « que, immédiatement après les dieux, je respecte et j’admire à l’égal d’Aristote et de Platon[6] ».

Or, c’était Jamblique qui, pendant ses longues années d’enseignement à Apamée de Syrie, avait le plus contribué à dévoyer le néo-platonisme et à le jeter dans les pratiques clandestines de la théurgie, laquelle, au lieu d’aider les âmes, comme le rêvait Plotin, à s’élever jusqu’à Dieu, prétendait évoquer de force les dieux et les démons sur la terre et dans l’âme des initiés[7]. La simple lecture du Livre des Mystères, dont Jamblique (ou peut-être seulement un de ses disciples) était l’auteur, décèle la dégradation de la

  1. Il est équitable de reconnaître qu’il impute à Maxime certaines améliorations de son caractère (Contre le Cynique Héraclius, Hertlein, p. 235 B).
  2. Ép. 92 (éd. Bidez, p. 182, l. 20).
  3. Fragm., dans Bidez, p. 215, l. 8.
  4. Contre le cynique Héraclius (p. 222 B, éd. Hertlein).
  5. Hymne au roi Hélios (p. 157 D, Hertlein).
  6. Contre le cynique Héraclius (p. 217 B, Hertlein).
  7. Voy. Karl Praechten, dans Archiv für Religionswiss., 1927, p. 200-213, et l’appréciation très sévère de Harnack sur Jamblique, Dogmengesch., I, 4e éd. (1909), p. 820.