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prière, parut de plus en plus sacrilège à mesure que le néo-platonisme s’enfonça davantage dans les pratiques théurgiques, encore que l’intention secrète qui l’avait dictée à Porphyre ne fût assurément ni sceptique ni dénigrante. Les dévots du paganisme durent souffrir du parti que la polémique chrétienne en tira, comme aussi des arguments efficaces qu’elle sut trouver dans la Philosophie des Oracles.

Du côté chrétien, on connaissait en gros le rôle que Porphyre avait assumé. « Hostis Dei », « veritatis inimicus », « sceleratarum artium magister », c’est ainsi que vers le milieu du ive siècle l’appelait Firmicus Maternus, lequel avant sa conversion le traitait courtoisement de « Porphyrius noster ». Pourtant on continuait de lire diverses parties de son œuvre, et il bénéficiait du prestige durable de la philosophie néo-platonicienne. N’était-ce pas lui qui avait vulgarisé la pensée de Plotin ; qui avait clarifié et rendu assimilable aux jeunes intelligences la Logique d’Aristote ? C’est chez Porphyre que saint Jérôme, jeune homme, s’initia à cette logique aristotélicienne : son ex-ami Rufin eut même le mauvais goût de lui en faire plus tard grief, aux temps de leur querelle[1]. — Quant à saint Augustin, il a des mots assez durs à l’égard de Porphyre ; il discute fortement dans la Cité de Dieu certaines de ses opinions ; il sait qu’il fut Christianorum acerrimus inimicus. Mais, en somme, il parle de lui avec respect : philosophus nobilis, magnus gentilium philosophus, doctissimus philosophorum, voilà de quelles épithètes il le décore[2]. Il le met à côté de Pythagore et de Platon, il le loue d’avoir

  1. Rufin, Contra Hieron., II, 19, 10, 12, 13.
  2. Voy. De Civitate Dei, VII, 25 ; VIII, 12 ; XIX, 22.