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ce Hiéroclès, auquel Eusèbe de Césarée devait s’en prendre dans un opuscule spécial vers 311-313. Or, c’est évidemment chez Porphyre qu’Hiéroclès était approvisionné d’arguments[1].

Ce qui est étrange, c’est que Lactance, qui était si bien au fait de l’effort païen dirigé dans les milieux intellectuels contre le christianisme et qui, dans ses Institutions, vise à dessein les esprits cultivés, ne prononce pas une seule fois le nom de Porphyre. Il y a bon nombre de ces bizarreries dans l’histoire littéraire des premiers siècles chrétiens. Croirait-on que Tertullien ne cite nulle part Hippolyte de Rome ni Clément d’Alexandrie, pas plus qu’Hippolyte ou Clément ne citent Tertullien ? Ni saint Ambroise ne parle de saint Jérôme, ni saint Athanase ne nomme saint Hilaire, qui avait tant souffert pour sa cause. Cassiodore a l’air d’ignorer saint Benoît, et réciproquement. Ces jeux singuliers du hasard, on les rencontrerait aussi dans la littérature « profane ». Horace ne nomme ni Ovide, ni Properce. Les contemporains de Plutarque gardent sur lui un silence absolu et Plutarque lui-même, si curieux d’esprit, ne mentionne aucun écrivain notoire de son époque, etc. Gardons-nous donc d’épiloguer sur le silence de Lactance. Il n’a pas lu Porphyre, voilà le fait. Et si ce fait étonne, c’est parce que Lactance écrivait quelques années avant la prohibition portée par Constantin contre l’ouvrage de Porphyre[2].

Cette condamnation officielle ne fit pas disparaître tous les exemplaires en circulation, puisqu’elle dut être renouvelée plus tard encore[3]. Mais elle en paralysa la diffusion

  1. Voy. p. 310.
  2. Voy. plus haut, p. 242.
  3. L’empereur Julien paraît en avoir eu un à sa disposition.