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ne lui rendent ce qu’ils auront reçu de lui », mais bien plutôt les pauvres, les estropiés, les boiteux, les aveugles, car ce qu’il fera pour eux lui sera rendu « à la résurrection des justes ». Porphyre ne tente pas le moindre effort pour deviner le sens caché de cet apparent paradoxe. Est-ce, chez le Christ, ferme dessein de subordonner tout intérêt personnel à la charité ? Ou faut-il soupçonner quelque intention de justifier l’orientation de la propagande chrétienne vers les Gentils, déshérités et infirmes sous le rapport spirituel ? Point ne lui chaut, il se contente d’épiloguer assez froidement sur les détails :

Il a voulu qu’on invitât au festin non pas ses amis, mais les infirmes. Alors, qu’un boiteux ou l’un quelconque de ces infirmes soit aussi un ami, il ne faudra donc pas l’inviter, en raison même de cette amitié ? À ce prix, il y a contradiction entre les préceptes. Si ce ne sont pas les amis, mais les boiteux et les aveugles qu’il faut inviter et qu’il arrive que ces disgraciés soient aussi nos amis, nous ne devons absolument pas les inviter[1] !

La parabole du grain de sénevé (Matth., XII, 31-38) lui paraît l’obscurité même, et tout de suite il s’en scandalise comme d’une sotte gageure audacieusement risquée[2]. L’intelligence « historique » lui fait parfois défaut à un degré qui déconcerte, quand on sait les autres puissances de son esprit.

Je ne puis accepter la définition qu’a donnée Paul Allard de Celse et de Porphyre, dont l’un serait le « Voltaire du paganisme », tandis que Porphyre « en serait plutôt le

  1. Ce texte ne figure pas dans le répertoire de Harnack. C’est un des cinq morceaux qu’il a trouvés après coup chez le pseudo-Polycarpe : voy. plus haut, p. 248. Il figure dans les Sitz.-Ber. de l’Acad. de Berlin, 1921, p. 270.
  2. Fragm. no 54. Cf. plus haut, p. 272.