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— Apollonius comprend « toutes les langues des hommes[1] », par un don surnaturel qui peut rappeler celui dont bénéficièrent les Apôtres, le jour de la Pentecôte. — Passons sur les cures merveilleuses et les exorcismes, dont, de part et d’autre les éléments et les résultats sont forcément les mêmes. Voici cependant un prodige dont le développement est assez semblable au récit de la résurrection de la fille de Jaïre :

Vie d’Apollonius, IV, 45. Saint Luc, VIII, 40 et s.
Une jeune fille nubile passait pour morte ; son fiancé suivait le lit mortuaire en poussant des cris, comme il arrive quand l’espoir d’un hymen a été trompé, et Rome tout entière pleurait avec lui, car la jeune fille était de famille consulaire. Apollonius, s’étant trouvé témoin de ce deuil, s’écria : « Posez ce lit, je me charge d’arrêter vos larmes. » Mais Apollonius ne fit que toucher la jeune fille et murmurer quelques mots ; et aussitôt cette personne qu’on avait crue morte parut sortir du sommeil. Elle poussa un cri, et revint à la maison paternelle, comme Alceste rendue à la vie par Hercule[2]. Voici que vint un homme nommé Jaïre. Et il était chef de la synagogue. Et tombant aux pieds de Jésus, il le suppliait d’entrer dans sa maison, parce qu’il avait une fille unique d’environ douze ans qui se mourait… Arrivant à la maison, Jésus dit : « Ne pleurez pas, car elle n’est pas morte, mais elle dort. » Et ils se moquaient de lui, sachant qu’elle était morte. Or, l’ayant prise par la main, il dit à haute voix : « Enfant, réveille-toi ! » Et son esprit lui revint, et elle se leva aussitôt. Et il prescrivit qu’on lui donnât à manger.

Devant un cas si merveilleux, Philostrate hésite, se reprend, et, en Hellène authentique qu’il est en son fond, émet un doute : « Maintenant, trouva-t-il en elle une dernière étincelle de vie, qui avait échappé à ceux qui la soi-

  1. I, 19.
  2. Trad. Chassang, p. 184 (légèrement retouchée).