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Nous le disons avec une peine sincère, le rapport de la Faculté affligera tous les amis du progrès, et ne réjouira que les adversaires de l’École de Paris. On ne peut deviner par quel motif un corps qui représente la science du droit, et qui, à ce titre, devrait chercher tous les moyens de la répandre, un corps pour lequel tout agrandissement de l’enseignement, toute création de chaire nouvelle devrait être un sujet de joie, abdique volontairement le rôle élevé que sa destination lui assigne, repousse obstinément toutes les ressources scientifiques qu’un ministre obtient de la munificence nationale (ressources que réclament toutes les Écoles de province, cent fois plus fidèles à leur caractère et à leur mission), et sollicite pour toute faveur de rester non pas une Faculté (c’est le haut enseignement qui constitue la Faculté), mais quelque chose comme une école préparatoire avec trois classes de Code civil.

Si ce système triomphe, les hommes qui s’intéressent aux destinées de la jurisprudence n’ont plus qu’un vœu à former, c’est qu’on défère à quelque autre établissement le riche héritage que répudie l’École de Paris ; car encore faut-il que le haut enseignement du droit ait sa place quelque part, comme l’enseignement supérieur des lettres ou des sciences. Qu’on établisse donc au Collège de France la véritable Faculté de droit, celle où s’enseigneront l’histoire de nos institutions, la philosophie du droit, la législation comparée, le droit canonique celle, en un mot, où il sera permis de compléter leur éducation aux gens qui croient encore qu’il y a une science du droit autre part que dans les deux mille articles du Code civil.

Loin de nous l’idée de rendre l’École tout entière responsable d’une pareille délibération. Tant que nous n’aurons pas vu les signatures, nous aimerons à croire que la majorité qui a rédigé ce rapport n’est peut-être qu’une minorité. Nous savons d’ailleurs ce que peut l’esprit de corps, et comment par des considérations toutes personnelles, par égard pour les cheveux blancs d’un collègue, par indifférence, souvent même par excès de modestie, on finit par accepter un acte qui, signé de tous, ne représente