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des professeurs ne connaît même pas de nom. Qu’on demande, par exemple, aux candidats de dire quels changements les Valois ont introduits dans la législation française ? de rechercher les sources de la coutume de Paris ? d’exposer leurs idées sur le caractère des Établissement de saint Louis ? de faire l’histoire des coutumes anglo-normandes du treizième au quinzième siècle, et mille autres questions semblables, rentrant toutes dans les connaissances nécessaires à un futur professeurd’histoire, je ne sais ce que le candidat répondra, mais je ne crois pas me tromper en avançant qu’une grande partie des professeurs n’a point d’opinions arrêtées sur ce point délicat, et serait fort embarrassée de juger un candidat exposant les origines germaniques ou canonique de la législation française. S’il en est ainsi, qu’est-ce donc qu’un concours pour la chaire d’histoire du droit ? Une déception. C’est ce qu’a compris M. de Salvandy, et, trouvant qu’en pareil cas il était impossible d’appliquer la loi, il a consulté, la Faculté sur le parti qu’on pourrait prendre. « Notre réponse est simple, dit le rapport, toute chaire vacante doit dire mise au concours. Nous invoquons une prompte application du principe à la vacances déjà trop prolongé de la chaire d’histoire du droit[1] La réponse est des plus claires, sans doute, mais on peut douter qu’elle soit des plus concluantes. La maxime dura lex, sed lex, n’a de sens que pour les faits accomplis et dire qu’on ne peut pas changer la loi parce qu’elle existe, ce n’est pas un raisonnement de législateur.Une bonne raison eût mieux valu que tout ce fracas de légalité.

L’École de Paris nous semble aussi fort sévère, en refusant au ministre le droit d’appeler à Paris des confrères que le hasard seul a placés sur un théâtre moins élevé. L’idée du ministre, de faire de tous ses professeurs de droit les membres d’une même corporation, nous semble aussi grande que juste, et rien ne légitime cette espèce de condamnation qui attache a perpétuité le professeur à telle chaire de telle Faculté, sans espoir de

  1. Rapport, p. 58.