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Je n’en veux pour exemple que les nominations des professeurs de l’École Polytechnique, faites depuis vingt ans sur la double présentation du Conseil de l’École et de l’Académie des sciences. Le résultat de ce système a été admirable, et ne peut se comparer à celui qu’a donné le concours.

La Faculté veut bien reconnaître que l’institution en elle-même étant d l’abri de toute attaque fondée, les dispositions réglementaires du concours peuvent être susceptibles d’améliorations ; s’il s’agit des épreuves, comme il est probable, on ne peut que regretter le silence de la Facutté sur les réformes à introduire en ce point. Ces épreuves, calculées en vue des connaissances générales qui doivent appartenir à l’examinateur, sont fort mal calculées pour l’enseignement spécial du professeur ; on nomme ainsi pour une chaire d’histoire du droit ou le droit administratif, non pas celui qui sait le mieux l’histoire ou le droit administratif, mais celui qui parle le mieux sur le Code civil ou le droit romain. Il est diffleile d’imaginer un meilleur système pour écarter de l’École tout savant véritable (hormis bien entendu les savants en droit civil, car ce qui constitue le savant, c’est en général la spécialité, c’est-à-dire l’application presque exclusive de l’esprit dans une certaine direction, et il est impossible qu’un homme qui a passé quinze ans à épuiser le droit administratif ou l’histoire de notre ancien droit, soit, au jour du concours, aussi bien préparé sur le Code civil qu’un jeune suppléant qui fait du Code son unique étude.

Il y a bien une épreuve spéciale mais, outre que cette épreuve n’a qu’une influence assez faible sur la décision des juges, il arrive souvent que les juges eux-mêmes ne sont point compétents pour apprécier en ce point le mérite des concurrents c’est notamment ce qui doit arriver pour la chaire d’histoire du droit. Depuis dix ans que cette science a commencé à se régénérer, combien de professeurs ont écrit sur l’histoire du droit français ou du droit romain ? Deux ou trois peut-être sur dix-huit ; ce sont cependant les quinze autres qui décideront, et sur des épreuves où seront agitées des questions que la grande majorité