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riété des études, de la fatigue intellectuelle qu’amène un même travail trop longtemps prolongé. Si le hasard du concours, si le choix du ministre l’a placé dans une chaire qu’il remplit honorablement, mais à laquelle ne l’appelaient pas ses goûts antérieurs, il peut rester fidèle à ses anciennes, non moins qu’a ses nouvelles études, et mettre a la disposition des jeunes gens tous les trésors de son intelligence. Ainsi, par exemple, Rennes, où la chaire d’histoire du droit n’existe même pas, possède un homme éminent par ses travaux historiques ; rien n’empêche la Faculté de s’enrichir de cet enseignement, sinon une absurde organisation qui condamne un homme né pour être un des professeurs les plus remarquables de l’histoire du droit, à donner exclusivement un cours de droit administratif. À Paris, deux professeurs justement considérés, ont fait de bons travaux sur les éléments du droit romain ; le premier, professeur de droit romain mais non pas d’Institutes, a le droit d’expliquer Gaius, mais il lui est défendu de toucher au remaniement de Gaius, que Justinien a publié sous son nom, car ce serait empiéter sur le domaine de deux de ses collègues ; le second a fait un livre élémentaire dans lequel une partie des étudiants de première année va chercher ou compléter son instruction, mais il lui est interdit d’enseigner de vive voix ce droit romain qu’il enseigne par écrit, et sur lequel il interroge, car il y a des titulaires, je me trompe, des propriétaires exclusifs du cours d’Institutes. Et cependant, avec huit cents étudiants, ce ne serait pas trop de quatre professeurs, pour que l’enseignement du droit romain fùt mis à la portée de tous ces esprits divers. Un autre avantage de la libre concurrence serait d’ouvrir immédiatement l’enseignement aux vingt-cinq suppléants, qu’une organisation aussi mauvaise que coûteuse en tient éloignés. Comprend-on qu’en France le quart des professeurs (vingt-cinq sur cent un), n’ait le droit de monter en chaire que par hasard en cas d’absence ou de maladie des titulaires ? Et ces hommes dont l’État paralyse ainsi la bonne volonté, sont ceux qui, par leur âge et leur désir de parvenir, offrent les meilleures garanties de zèle