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c’est encore aujourd’hui sa devise. Si, dit fièrement le rapport, si les raions qui fondent notre conclusion négative (c’est-à-dire l’opposition de la Faculté au dédoublement de la chaire de procédure civile et de la législation criminelle) ne paraissent pas déterminantes à M. le ministre et à la commission des hautes études, il y aurait lieu alors d’envisager au point de vue de la légalité la mesure proposée. À cet égard, nous pensons que la constitution d’une chaire dont les attributions ont été déterminées par une loi[1]. En d’autres termes, il s’agit d’ajouter un nouveau chapitre à la loi d’expropriation pour cause d’utilité publique, et l’enseignement appartient, non point à l’État représenté par le ministre, mais au professeur qui tient sa chaire par droit de domaine.

Franchement la Faculté nous semble abuser ici du grand mot de légalité. Des deux chaires de procédure civile et criminelle, une au moins a été créée par ordonnance ; et nous ne voyaons pas a priori pourquoi une ordonnance ne pourrait modifier an 1843 ce qu’une ordonnance a établi en 1849. Il nous est également difficile d’imaginer comment une ordonnance qui a créé deux professeurs pour un même enseignement était égale, et comment une ordonnance qui partagerait un enseignement entre deux professeur serait nécessairement illégale. Il nous est moins malaisé de comprendre comment une ordonnance rendue en 1819, par un ministre qui n’a consulté personne, a pu retrancher légalement au Code civil l’enseignement du droit public français et du droit civil dans ses rapports avec l’administration publique, que leur attribuait la loi de 1804, et en faire l’objet d’une chaire spéciale ; et comment, en 1845, une ordonnance rendue par un ministre qui s’entoure des plus vives lumières, et qui a pour lui l’assentiment et la sollicitation de huit Facultés sur neuf, sera en opposition avec la légalité, surtout quand cette réforme respecte le titre du professeur, sa seule propriété, et ne l’atteint ni dans son intérêt, ni dans son honneur.

  1. Rapport, p. 58.