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leur capacité non sur leur assiduité aux leçons, mais sur le fruit qu’ils en ont tiré.

« Qu’un examen long et approfondi réponde de la capacité des aspirants, mais que cet examen ne soit pas illusoire, que ce ne soit pas une vaine formalité. On a trop longtemps bercé les hommes avec des paroles, il est temps d’obtenir des réalités ; qu’elles soient garanties par des moyens infaillibles. La présence du public avant tout, car l’œil du public écarte l’ineptie par la honte, et rend impossibles les fraudes et les préférences.

«  Il existe dans l’émulation des élèves un ressort puissant dont la main du législateur habile doit aussi s’emparer. Laissez-le, joignez-y celui de leur intérêt personnel, et vous aurez la meilleure garantie de la réalité et de la réalité et de l’efficacité des examens »

Mettre le légitime orgueil et le légitime intérêt de l’étudiant à bien faire, tel est tout le secret d’une bonne éducation. C’est ainsi qu’on agit en Allemagne, c’est ainsi qu’on devrait agir en France, si nous ne vivions dans un pays où les belles paroles ont trop souvent tenu lieu de la réalité. En Prusse, dans une monarchie absolue, l’étudiant qui travaille n’a point à s’inquiéter de son avenir à la fin de ses études qu’il soit savant, c’est la seule chose qu’on lui demande. Pauvre ou riche, noble ou non, la science, au bout de trois années, lui ouvrira infailliblement la magistrature et l’administration. Cette carrière offerte au plus digne, fait du temps d’université un concours perpétuel, où l’émulation et l’intérêt des jeunes gens sont toujours en jeu, et ne leur laissent point un instant de repos. En France, pays de beau langage, la Charte promet à tous les citoyens une égale admissibilité dans les services publics ; mais depuis trente ans on n’a pas encore imaginé qu’entre des titres égaux le mérite seul et le travail devaient décider. Il en est de cette vérité officielle comme de beaucoup d’autres, sunt verba et voces. Ce qui fait un candidat en Allemagne, c’est le savoir ; ce qui fait un magistrat en Prusse, c’est la science ; mais en France, ce qui fait un licencié, c’est un examen ; ce qui fait un magistrat, c’est un député. Et l’on s’étonne que l’étudiant ne se consacre pas sans arrière-pen-