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constitution des États-Unis ne serait pas anglaise d’esprit ? Elle est complètement anglaise ; il est impossible de la comprendre si on ne connaît pas les institutions de la Grande-Bretagne.

La forme de cette constitution, l’idée de cette constitution, les garanties en faveur de la liberté, tout cela est du droit anglais. Le bill de 1689, le palladium des libertés anglaises, est reproduit dans la constitution de 1787. Le jury, la défense orale, la liberté de la presse, tout cela, ce sont des libertés anglaises acceptées, conservées par l’Amérique. La division des pouvoirs est une importation anglaise, l’indépendance du pouvoir judiciaire, c’est encore une chose qui n’existe qu’en Angleterre et en Amérique. Partout ailleurs, le magistrat est un délégué du pouvoir exécutif ; le pouvoir judiciaire est une fonction du gouvernement. Chez nous, la magistrature est entourée de certaines garanties, elle est inamovible, mais enfin on lui fait sentir qu’elle est une fonction du pouvoir exécutif ; elle est chargée de maintenir l’ordre public, l’administration, les lois ; son esprit doit être l’esprit du gouvernement. Il n’y a que l’Angleterre et l’Amérique qui disent au magistrat : « Tu es chargé non-seulement de maintenir l’ordre au nom de la loi, mais le respect de la loi et de la constitution contre tous. Que ce soit le gouvernement, les chambres, les pouvoirs législatif et exécutif réunis qui pensent autrement, il n’importe ; toi, magistrat, tu es institué pour empêcher qu’on ne touche aux lois. » C’est là une idée particulière aux Anglais et aux Américains.