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Il y a encore cette énorme différence qu’en fait la constitution de 1787 est démocratique, puisque la liberté y est le droit commun, tandis que, dans la charte du Sud, la liberté est le privilège d’une aristocratie.

Ici j’arrive à une nouvelle objection. S’il en est ainsi, dira-t-on, si la seconde constitution est semblable à la première, comment se fait-il que celle-ci n’ait pas empêché la séparation ? C’est là une objection naïve. Une constitution est une loi qui organise les pouvoirs publics, afin de garantir la liberté ; mais s’imaginer qu’une constitution peut réunir tous les cœurs, apaiser toutes les passions, prévenir tous les désordres, c’est une utopie. Nulle constitution ne fait de ces miracles ; la religion elle-même y est impuissante, et il est aussi peu raisonnable de reprocher au christianisme la Saint-Barthélémy qu’à la constitution américaine la guerre civile. La religion prêchait l’humanité, les hommes ont été des bourreaux ; la constitution prêchait l’accord entre les partis, les partis ont voulu s’entretuer et s’entre-déchirer. La faute en est aux hommes, mais non à la religion ni à la constitution. Supprimez l’esclavage et les passions qu’il enfante, la constitution sera tout aussi respectée qu’il y a trente ans, l’Amérique n’aura pas de révolution.

Est-ce donc l’esclavage seul qui est la cause de la révolution ? Je réponds : Oui, c’est l’esclavage qui est la grande cause, l’unique cause de la séparation.

J’insiste sur ce point, et je vous en donnerai tout à l’heure la preuve positive, parce qu’en Europe on a