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nous faisons étudier par nos jeunes artistes les chefs-d’œuvre de Raphaël. Nous avons l’école de Rome » Qu’est-ce que nous allons faire à Rome, sinon nous assimiler les grands peintres de la Renaissance ? Ces peintres ne sont pas Français. En sculpture, en architecture, nous faisons de même, nous envoyons nos jeunes sculpteurs en Grèce. Phidias est-il Français ? En est-il moins notre maître ? Nous allons en chemin de fer, c’est un Anglais qui a inventé les chemins de fer ; en bateau à vapeur, c’est un Américain qui l’a créé. Est-ce que nous allons dire aux Anglais : nous sommes Français, nous ne voulons pas de vos chemins de fer ? aux Américains : nous sommes Français, nous ne voulons pas de vos bateaux à vapeur ? Non, nous faisons mieux ; nous empruntons à nos rivaux ces inventions qui les enrichissent. Nous les transformons, nous avons des bateaux à vapeur qui sont français, des chemins de fer qui sont français, et un beau jour nous perfectionnons ces inventions que nous empruntent à leur tour les Américains et les Anglais. Le monde est ainsi un lieu d’échanges perpétuels, où le génie d’un peuple profite à tous, et où tous profitent du progrès de chacun, à la seule condition de ne pas se cantonner dans leur ignorance et leur vanité.

Eh bien, il y a des peuples mieux servis par la fortune, par les événements, par leur sagesse peut-être, et qui ont su faire de la liberté politique quelque chose de durable et de fécond. Voilà ce que j’ai cherché en Amérique. Voilà un pays qui a prospéré à l’abri d’une constitution tellement respectée, que, dans la guerre civile, chacun se la dispute. Il y a là