Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 3.djvu/55

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sident doit être rééligible. Déclarer qu’il ne le sera pas, c’est empiéter sur le droit de la nation qui peut avoir intérêt à conserver un homme capable à la tête des affaires ; mais, d’un autre côté, décider qu’il pourra être réélu, c’est introduire dans le gouvernement un intérêt qui n’est plus national ; c’est donner à un homme le désir de se faire renommer et la pensée d’employer tous les ressorts de l’administration pour satisfaire une ambition personnelle.

On s’est aperçu de cet inconvénient en Amérique. Dans la constitution fédérale, le président est rééligible indéfiniment. À la fin des quatre ans de sa première présidence, Washington n’avait qu’un désir, c’était de rentrer dans la vie privée. En 1792, ce fut Jefferson, lequel représentait une politique opposée à celle de Washington, qui prit l’initiative et proposa au général de se faire réélire. Jefferson était un esprit hardi et quelquefois bizarre, mais c’était un esprit pratique. Il comprit que l’œuvre de Washington n’était pas finie ; il avait peur qu’un parti puissant n’établît la monarchie. Il écrivit au général : « La république a encore des dangers à redouter, vous êtes le seul homme en qui nous puissions avoir une confiance absolue, le seul qui puisse nous tirer d’un pas difficile, il faut que vous restiez président. » Washington, avec la simplicité d’un grand homme, répondit : « Si vous croyez nécessaire ma présence au pouvoir, je resterai. » Mais après ces huit années d’autorité, il ne voulut pas laisser après lui l’exemple d’un président se perpétuant au pouvoir ; il insista pour être remplacé. Depuis lors, il est de règle