Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 3.djvu/544

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

celui qui se place à la distance d’un siècle puisse trouver sous la constitution existante, en dépit de toutes les transformations qu’elle a subies, la constitution primitive ; de même qu’un homme, après avoir traversé la vie, est toujours le même homme. Mais suspendre la vie d’une nation, mettre tous les pouvoirs en l’air, inquiéter tout le monde, c’est une idée que les Américains n’ont jamais eue. C’est une erreur particulière à la France, une de celles qui nous ont coûté le plus cher.

Toutes les fois qu’il y a des révolutions en France, et malheureusement nous en avons fait la fréquente expérience, le premier soin des législateurs est de faire une constitution qui ressemble le moins possible à l’ancienne. Cette constitution faite pour les idées du moment, devrait être essentiellement mobile, puisque l’expérience de la veille prouve qu’une constitution n’est pas faite pour toujours durer. Point du tout : le premier soin des législateurs c’est d’enchaîner le pays, et de lui défendre de toucher à une œuvre qui souvent n’est pas faite pour vivre. Ainsi, en 1791, lorsque l’Assemblée constituante, après deux ans de travail, eut voté une constitution qui devait durer six mois, son premier soin fut de défendre qu’on y touchât avant trente ans. C’est en 1821 qu’on devait avoir le droit d’amender la constitution de 1791. Dans l’intervalle, la France avait eu six révolutions.

En 1848, telle a été aussi la pensée du législateur. On ne pouvait toucher à la constitution qu’à la fin du terme d’une assemblée. Supposez que la France eût