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qui ne soit en deuil ; depuis deux ans, il est tombé un million d’hommes sur les champs de bataille ; les finances sont dans un état désespéré, la dette du Nord sera à la fin de cette année de dix milliards ; nous ne parlons pas de celle du Sud qui probablement ne sera jamais payée. Qu’a fait cette constitution que vous nous vantez, qu’a-t-elle empêché ? Vous le voyez, chaque parti la déchire ! Cessez donc de nous en parler ! L’Amérique a dû le bonheur dont elle a joui à son vaste territoire, à ce que les émigrants de tous les pays pouvaient s’y donner rendez-vous ; mais la constitution n’est pour rien dans cette haute fortune ; elle s’est effondrée au premier choc des discordes civiles. L’Amérique a maintenant des armées permanentes, nous savons en Europe où cela conduit les nations. La liberté américaine finira par aboutir à quelque despotisme glorieux.

Je vais essayer de répondre à cette première objection, j’espère que ma réponse vous satisfera.

Cette constitution, quelle est la situation que les événements lui ont faite ? Cette constitution qui n’a rien empêché, tout le monde sans doute doit la haïr. Eh bien, au contraire, tout le monde la respecte ; la seule chose qui surnage au milieu de la révolution, c’est elle. Le Sud prétend qu’elle lui appartient, que lui seul y est resté fidèle ; le Nord soutient au contraire que c’est lui qui la défend ; c’est une arche sainte que les deux partis se disputent. Que signifie ce singulier phénomène ? Comment se fait-il qu’un pays soit attaché à une charte qui pour nous est déjà morte ? Comment se fait-il surtout qu’un peuple puisse avoir pour sa constitution le culte