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propriété et de la liberté, qu’on arrive ainsi à troubler la sécurité, à faire peur aux intérêts, à interrompre le travail, et qu’on marche par l’anarchie au pouvoir absolu. Il y a donc là un problème des plus délicats.

Ce problème occupa quelque temps les législateurs américains. Ils avaient résolu la question si grave du pouvoir législatif en le divisant en deux assemblées, à l’exemple de l’Angleterre ; ils empruntèrent aussi aux Anglais, en la modifiant, la constitution du pouvoir exécutif. Non pas qu’en Amérique on ait voulu copier l’Angleterre ; on était loin de vouloir une monarchie ; mais imbus, dès l’enfance, des idées anglaises, habitués à leurs gouvernements provinciaux qui n’étaient au fond que des gouvernements à la mode anglaise, les Américains sentirent la nécessité de se donner aussi, comme cela existait dans la mère patrie, un pouvoir exécutif unique et responsable.

En quelques pays on a cru se débarrasser des inconvénients du pouvoir exécutif en le divisant, ou bien en lui associant un conseil sans lequel il ne puisse rien faire. L’expérience a montré que cet affaiblissement du pouvoir exécutif amenait nécessairement un mauvais gouvernement. Nous en avons un exemple célèbre dans notre histoire, c’est le Directoire. Certes les hommes qui firent la constitution de l’an III étaient des patriotes sincères, éclairés, dévoués au bien public. Daunou, Boissy d’Anglas, éprouvés par la révolution, avaient le vif désir de fonder la liberté, ils remplissaient toutes les conditions qu’on peut exiger des législateurs ; mais, par crainte des souvenirs monarchiques, ils n’osèrent