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celui qui a ses racines dans la nation. Une assemblée est comme un arbre qui doit plonger dans le sol ; c’est là qu’elle trouve la sève qui la nourrit. La force des assemblées, c’est cette communion de l’électeur et du député, qui fait que le député ne parle pas en son nom propre, mais au nom de tous ceux qui sont derrière lui. Il était donc nécessaire, si l’on voulait une seconde assemblée qui ne fût pas inférieure à la première, qu’elle eût aussi ses racines dans le peuple. Et c’est là ce que nous n’avons jamais compris en France. Nommer une assemblée héréditaire comme l’était la pairie de la Restauration dans un pays sans aristocratie, ou établir une pairie viagère dont les membres sont choisis par le roi comme ils l’étaient en 1830, ou par l’empereur, comme le sont aujourd’hui les sénateurs, ce n’est pas donner à cette assemblée une racine populaire. Cette assemblée ne représente rien ; elle n’est ni le pouvoir, ni le peuple. La Chambre des représentants sera évidemment plus forte que sa rivale, et il importe au contraire au maintien de l’ordre et de la liberté que la seconde assemblée ne soit pas moins populaire que la première. C’est ce que comprirent les Américains quand ils rejetèrent le système de Randolph.

On proposa de faire nommer le Sénat par le peuple. Mais là se trouvait un autre danger. On voulait une assemblée modérée qui fût une garantie pour le gouvernement et pour les relations extérieures ; on ne pouvait s’en remettre au suffrage universel, qui aurait envoyé une Chambre animée des mêmes passions que la Chambre des représentants. On décida donc que l’élection par