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sinon qu’il reste chez lui, dans son cabinet. Quand on accepte le mandat d’un grand peuple, c’est pour agir et non pour conserver sa santé.

Sieyès fut un des proscripteurs du 18 fructidor et un des complices du 18 brumaire ; mais il resta toujours un rêveur politique. C’est lui qui, au commencement de la révolution, avait demandé qu’on divisât la France en casiers égaux et numérotés, de façon à effacer tout souvenir du passé. On aurait dit : J’appartiens au département n° 53, canton n° 89. Sieyès ne s’apercevait pas qu’avec le temps qui anoblit tout, ces numéros seraient devenus des noms illustres comme le numéro de la 32e demi-brigade.

En l’an VIII, Sieyès avait donc fait sa constitution ; mais nous ne la connaissons qu’en fragments. Sur le point de la mettre en action, Sieyès rencontra le général Bonaparte, qui comprit très-bien ce qu’il y avait de bon pour lui dans cette machine qui absorbait toutes les libertés publiques. Quant à l’absorption du pouvoir exécutif, Bonaparte y mit bon ordre. Vous savez la fameuse réponse que fit le général au théoricien. Sieyès murmura ; le premier consul le fit taire, non à la façon de Mirabeau, mais en jetant au cerbère un gâteau, la terre de Crosnes qui valait un million. Sieyès devint sénateur et ne parla plus.

Suivant la constitution de l’an VIII, il y a dans chaque canton une liste d’électeurs. Ces électeurs du canton nomment des électeurs d’arrondissement, et les électeurs d’arrondissement des électeurs du département. C’est sur cette liste que le sénat choisissait les membres