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Nous aurons accompli le rêve d’un grand roi de France, Henri IV, nous aurons fondé un système politique embrassant un vaste ensemble de territoires, unis en paix, sous un chef qui peut accommoder tous les différends, sans détruire la race humaine.

« Les États ne peuvent se faire la guerre ; le gouvernement général est le suprême arbitre de leurs querelles ; toute la force de l’Union est conjurée pour ramener l’aggresseur à la raison. Quel bienfait donné en échange de la souveraineté vacillante et querelleuse des États !

« Pour moi, en contemplant ce système, je me perds dans l’admiration de sa grandeur. En adoptant ce gouvernement, nous élevons des temples à la liberté par toute la terre. Du succès de l’Amérique, dans ce combat pour la liberté, dépendent les efforts de tout ce qu’il y a d’hommes courageux et éclairés dans les autres pays. Les avantages ne seront pas limités aux États-Unis, ils tireront de l’Europe les nobles cœurs qui soupirent après la liberté. Pour garder leurs sujets, les princes seront obligés de leur rendre une partie des droits qu’ils leur ont ravis depuis des siècles. Nous servirons ainsi les grands desseins de la Providence, en favorisant la multiplication des hommes, leur progrès en intelligence et en bonheur[1]. »

Magnifiques espérances qu’on a pu croire réalisées chez nous au lendemain de 1789, mais qui restent vraies, malgré nos fautes. Oui, le monde est solidaire, et rien de ce qui se passe chez les autres peuples ne nous est étranger. Cette solidarité des nations est une des choses qui me frappent le plus à mesure que j’étudie la politique. On ne peut affranchir un peuple, ou

  1. Elliot, Debates of the Convention, t. II, p. 397 et suiv.