Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 3.djvu/293

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans tous les vices du système européen. Trois grands États sur un même continent, ce seraient trois rivaux en présence, avec tous les dangers des jalousies commerciales et des ambitions politiques.

Restait donc le système de la république confédérée, qui joint la vigueur et la décision d’une grande monarchie à la liberté et aux bienfaits d’une petite république. Et alors Wilson prononça cette parole remarquable : « En Amérique, dit-il, le territoire est monarchique et le peuple républicain. »

Ce mot : le territoire est monarchique, étonne au premier abord ; mais en y réfléchissant, on en sent la profondeur. Ce n’est pas le hasard qui fait que la France est un pays unitaire. Strabon avait remarqué que la Gaule, par la façon dont elle est faite, avec ses vastes plaines et ses larges fleuves, était destinée à devenir le théâtre d’une grande civilisation. Au contraire, un pays coupé en petites vallées par de hautes montagnes peut, sans doute, être occupé par un peuple remarquable, — les Grecs, dans les temps anciens, les Suisses, dans les temps modernes, ne le cèdent à personne, — mais un grand État ne peut s’y établir. La nature s’oppose à ce qu’il y ait là une grande nation.

Or, si vous considérez l’Amérique, vous trouvez qu’elle se compose de deux immenses vallées arrosées par le Mississipi d’un côté, le Saint-Laurent de l’autre, et réunies par les Lacs. Entre ces deux vallées, il n’y a même pas de séparation ; la différence de niveau est si peu considérable, que quand les eaux du lac Michigan sont trop hautes, elles se déversent dans un affluent du