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voulu devenir une grande république, elle est devenue un empire, une démocratie sans représentation, sans garanties politiques et à la merci de la soldatesque. Les Pays-Bas n’avaient été qu’une collection de petites républiques, et n’avaient pas su se donner l’unité nécessaire pour faire un grand pays. L’Amérique cependant voulait être un grand pays. Madison sentait cela, et cherchait à organiser de la meilleure façon possible le pouvoir national de façon à ce qu’on pût constituer une république. C’était sa pensée, qu’il assistait à une œuvre décisive pour l’Amérique et pour l’humanité. Aussi, tandis que ses collègues s’occupaient de ce qu’ils avaient à faire dans l’assemblée, il consacrait ses nuits à tenir un procès-verbal très-exact de ce qui s’y disait. Et ce procès-verbal, connu sous le nom de Papiers de Madison et publié cinquante ans plus tard, est aujourd’hui le plus sûr commentaire de la constitution.

À ce moment, les idées de Madison étaient plus sages et plus pratiques que celles d’Hamilton. Hamilton rêvait une république aristocratique : l’Angleterre avec un président au lieu d’un roi, et des sénateurs viagers au lieu de lords héréditaires. Madison, au contraire, voulait une organisation entièrement démocratique, mais avec un pouvoir exécutif énergique et deux chambres. Il regardait l’institution d’une seule chambre comme mortelle pour la république. Il voulait, en outre, un pouvoir judiciaire indépendant ; en deux mots, un gouvernement assez fort pour maintenir l’unité, mais hors d’état d’écraser l’indépendance locale.

C’est lui qui eut la conception la plus nette de la