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faire comme on fait en pareille circonstance ; il se dit qu’il était soldat, qu’il perdrait toute influence s’il ne se battait pas, et il se décida à se battre, en disant à ses amis qu’il laisserait Aaron Burr tirer deux fois sur lui, et que, quant à lui, il ne tirerait pas. C’était sa façon de concilier l’honneur et le devoir.

Le mercredi 11 juillet 1804, Aaron Burr traversa le North-River pour gagner le New-Jersey ; il y trouva Hamilton accompagné de M. Pendleton et du docteur Hosack, un des médecins les plus considérables de New-York. Voici le récit que le docteur nous a laissé de ce duel.

« Burr tira le premier : la balle frappa Hamilton au côté droit, passant au travers des vertèbres. Quand la balle le toucha, le colonel se dressa involontairement sur les pieds, tourna à gauche ; à ce moment, son pistolet fit feu, et le colonel tomba sur la face.

« Je courus, et je le trouvai assis à terre, soutenu dans les bras de Pendleton. Il eut assez de force pour me dire : Docteur, c’est une blessure mortelle ; puis il s’évanouit, et nous le crûmes mort.

« On le mit dans la barque, où il resta insensible jusqu’à ce qu’on se fût éloigné de terre d’environ cinq cents toises. Nos soins le rappelèrent à la vie ; il dit : ma vue se trouble. Sa vue s’éclaircit, et apercevant le pistolet qu’il avait tenu (ne sachant pas qu’il avait tiré), il dit : Prenez garde à ce pistolet, il est chargé et armé ; il pourrait partir et causer quelque malheur. Pendleton sait que je n’avais pas l’intention de tirer sur lui.

« En approchant de la rive, il me dit : Envoyez chercher madame Hamilton, et prévenez-la peu à peu ; mais laissez-lui de l’espérance.