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d’un violent amour, et que le noble enthousiasme de la liberté va aisément jusqu’à la défiance.

« De l’autre côté, on oubliera que la force du gouvernement est essentielle au maintien de la liberté. Que dans l’opinion d’un esprit sain et éclairé, ces deux intérêts sont inséparables, et qu’une dangereuse ambition se cache plus souvent sous le voile spécieux de l’amour du peuple, que sous l’apparence peu séduisante du zèle pour le gouvernement.

« L’histoire nous apprend que la première de ces deux routes a, plus souvent que l’autre, conduit au despotisme, et que la plupart des hommes qui ont détruit la liberté des républiques ont commencé par capter la bienveillance du peuple, et se sont faits démagogues pour devenir tyrans.

« Si je publie ces réflexions, c’est pour mettre mes concitoyens en garde contre toutes les tentatives que, de part et d’autre, on fera pour influencer leur décision par d’autres mobiles que la raison et la vérité.

« Je crois fermement qu’il est de votre intérêt d’adopter la constitution : je crois que votre liberté, votre puissance, votre prospérité y sont engagées.

« Je n’affecte point une réserve que je n’ai pas. Je ne veux pas vous tromper par l’apparence du doute, quand mon opinion est faite. J’avoue franchement ma conviction, et je vous dirai librement les raisons sur quoi elle est fondée. Quand on a conscience de la droiture de ses intentions, on dédaigne les détours.

« À cet égard, je ne multiplierai pas les protestations. Mes intentions sont le secret de mon cœur ; mes raisons seront exposées à tous les yeux, chacun pourra les juger. Elles seront présentées avec un courage qui ne faillira point à la cause de la vérité. »

Vous voyez combien cela est écrit avec fermeté, et combien c’est véritablement le langage qu’on doit parler