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ne pouvez empêcher certains intérêts de se faire jour. Ainsi une assemblée dira toujours : « Le pouvoir est trop fort, » et de la constitution de 1789, comme de celle de 1848, sortit un pouvoir exécutif qui n’était pas suffisamment constitué. Dans les deux cas, on est arrivé à l’anarchie, et puis à une révolution. Ou bien, une assemblée se dira : « Je ne veux pas de deux chambres, » et on aura une des plus mauvaises formes de l’omnipotence parlementaire. Je ne connais pas d’exemple d’un pays qui ait vécu avec une seule assemblée. Quelquefois, quand une assemblée a fait une constitution, elle usurpe la souveraineté au profit de son œuvre, et le premier soin qu’elle a, c’est d’engager l’avenir. On donne, en d’autres termes, la souveraineté à un morceau de papier. Savez-vous à quelle époque on devait réformer la constitution de 1791, qui mourut en 1791 ? On ne devait y toucher qu’en 1811 ou 1821. Comptez combien la France a eu de révolutions et de gouvernements entre ces deux dates. C’est là une usurpation de la souveraineté. Un peuple a toujours le droit de reviser sa constitution, car elle est faite pour lui. Qu’il faille le consulter, qu’il faille agir légalement, que ce ne soit pas le premier groupe venu qui puisse réformer cette constitution, c’est naturel ; mais mettre un pays dans cette situation, où nous l’avons vu deux fois en soixante ans, que la majorité du peuple veuille réformer la constitution, et qu’on lui oppose une feuille de papier en lui disant : — « Tu ne peux pas, cette feuille de papier te le défend, » je le déclare, c’est une des plus grandes folies constitutionnelles ou non