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voir on avait peu de ressources. Le grand commerce du Massachusetts, la pêche, se trouvait à peu près détruit ; le sol n’est pas riche, il y avait donc de grandes souffrances.

D’un autre côté il y avait de très-lourdes dettes particulières. Au début de la révolution, dans le premier enthousiasme, chacun s’était armé ; on avait emprunté pour que les femmes et les enfants pussent vivre pendant que les hommes étaient au camp, et on était arrivé ainsi à une situation tellement précaire qu’il avait fallu fermer les tribunaux et empêcher les créanciers de poursuivre leurs débiteurs. La paix rétablie, les créanciers, fort misérables eux-mêmes, redemandèrent leur argent : les tribunaux se rouvrirent ; mais, comme autrefois à Rome, le nombre des débiteurs était plus considérable que celui des créanciers, et la majorité sentait sa force[1]. Des conventions qui, suivant l’usage, s’intitulaient le peuple, protestèrent contre la dureté des lois, faites, disait-on, pour et par les riches. On en vint à demander si la loi agraire ne serait pas juste ; car enfin, disait-on, si nos créanciers ont des richesses, à qui le doivent-ils ? à nous, à notre courage ; si nous ne nous étions pas battus, l’Angleterre aurait tout confisqué. Ces terres, cet argent qui sans nous auraient été perdus sont donc à nous autant qu’à leurs propriétaires. Il faut se débarrasser de ces tribunaux qui condamnent les pauvres gens, de ces hommes d’affaires et de ces avocats qui sont des sangsues publiques.

  1. Pitkin, t. II, p. 214.