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rope. Toutes les colonies appartenaient à des métropoles qui en disposaient à leur gré. Mais l’avènement des États-Unis détruisait l’équilibre colonial. Désormais il fallait les avoir pour amis, ou sans cela on allait avoir contre soi une puissance qui, par l’étendue de ses côtes, la richesse de son territoire, l’énergie de son peuple, était appelée à devenir une des plus grandes, sinon la plus grande puissance commerciale du monde.

Ce qui cachait l’avenir à lord Sheffield, c’était la faiblesse politique du congrès. Lord Sheffield disait : « Pourquoi traiter avec l’Amérique, pourquoi lui ouvrir nos ports ? Nous chargerons nos marchandises sur nos navires et nous les porterons nous-mêmes aux Américains. Avec qui pourrions-nous traiter ? Avec le congrès ? c’est une ombre. Avec les États ? ils sont divisés entre eux. Leur jalousie mutuelle nous assure que si l’un d’eux prenait des mesures contre nous, les États voisins nous accorderaient aussitôt des faveurs pour monopoliser notre commerce. Contentons-nous d’envoyer des consuls dans les divers États. Ces consuls protégeront nos intérêts, aplaniront les voies à notre commerce, et nous aurons ainsi le monopole des marchés américains. » Lord Sheffield ne s’en tenait pas là. Jetant un coup d’œil sur l’avenir, il se livrait à des prédictions politiques, ce qui est dangereux, parce qu’en général on prédit de travers. Il disait : « Voyez où en est l’Amérique. Regardez l’anarchie qui y règne ! De cette confusion il ne sortira jamais un empire. Pour que toutes les colonies se réunissent contre nous, il a